Peu importe leurs noms, gated community, " ville privée ", country club, condominium, barrio cerrado, barrio privado, " enclave résidentielle ", " lotissement sécurisé "... une chose est sûre : ce produit immobilier se vend très bien, partout dans le monde, et se démarque de la ville, rompt avec la continuité urbaine, ferme les espaces publics et impose une urbanité sélective, une citadinité discriminante. Né au XVIIIe siècle en France (la " villa ") et en Grande-Bretagne (le " square "), ce " morceau " de ville en co-propriété (CID, common interest development) dans la " vraie " ville s'est implanté aux États-Unis, dès le début du XIXe siècle, pour connaître une incroyable prolifération depuis une trentaine d'années et se généraliser dans la plupart des pays. Aux motifs d'une résidence au calme, entourée de verdure, parmi des voisins choisis, bénéficiant d'un golf et d'une piscine, est venu s'ajouter assez rapidement, l'argument sécuritaire. Ce sont le gardiennage, la vidéo-surveillance et la présence permanente de vigiles contrôlant la seule porte d'accès qui donnent son nom (gated community, " commauté grillagée ", " communauté munie d'une porte ") à cet ensemble, replié sur lui-même, de logements. Une nouvelle motivation s'empare des acheteurs vieillissants, sa dimension médicale, avec masseur-kinésithérapeute, gérontologue. Ces quartiers fermés rivalisent en offres qui ciblent des " clientèles " particulières (les gays, les plus de 55 ans, les végétariens, etc.) ou bien qui misent sur la qualité de vie (parcs et jardins, normes écologiques.)Ersatz de villes ? Fin de la ville ? Repli sur soi ? Quartier barricadé ? Les auteurs fournissent les pièces d'un dossier " chaud " qui révèle l'existence d'un établissement humain qui nie l'esprit de la ville et refuse de " faire société ".