Parlons de toits, ou la surélévation du bâti, une réponse à la densification ?

De nombreuses communes françaises sont confrontées au manque de logements au regard des besoins de leurs habitants*. Dans les zones tendues, il est même question de fortes pénuries**. Avec la promulgation de la loi Climat et Résilience (22 août 2021), plusieurs dispositions visent à lutter contre l’artificialisation des sols, risquant ainsi d’augmenter le manque de foncier disponible pour la construction des logements nécessaires. Satisfaire les demandes en logements tout en limitant l’étalement urbain peut sembler être une gageure. Mais en regardant de plus prêt nos villes, certaines disponibilités foncières se dévoilent qui permettraient – en partie - de miser sur l’existant : bâtiments vacants, « dents creuses », friches urbaines, foncier aérien …

Un contexte législatif favorable à la densification verticale

Ce que l’on appelle le foncier aérien correspond à la surélévation des bâtis existants. Opportunité pour créer des logements neufs sans augmenter l’artificialisation, la surélévation correspond aux objectifs de la loi. Les évolutions du contexte législatif favorisent cette densification verticale : depuis la dérogation aux règles de gabarit permises par l’ordonnance « Dufflot » (3 octobre 2013) jusqu’à la suppression de la règle de densité (COS), introduite par la loi ALUR (24 mars 2014) ou bien la possibilité de créer un lot « transitoire de la copropriété » sur le toit, permise par la loi ELAN (23 novembre 2018). A compter du 1er janvier 2023, La loi Climat et Résilience apporte un nouvel outil destiné à faciliter la réversibilité du bâti : l’étude du potentiel de changement de destination et d’évolution. Requise préalablement aux travaux de construction et de démolition de certains bâtiments, cette étude intègre y compris le potentiel résultant de la surélévation.

Un certain nombre de PLU et de PLUi considèrent la possibilité de surélévation des bâtis existants, en s’appuyant sur divers outils. Ils sont cependant encore peu nombreux et les collectivités qui les promeuvent (ville de Paris, Métropole de Lyon, Métropole de Bordeaux …) constatent que malgré l’intérêt des dispositifs, le nombre de logements supplémentaires réalisés reste tout relatif.

La surélévation, un levier pour limiter l’étalement urbain

C’est que la surélévation ne se décrète pas. Certes, pour des copropriétés elle peut créer de la plus-value à partager entre les différents copropriétaires qui peut servir à financer des travaux importants tels que ravalement de façade, remise aux normes électriques, rénovation énergétique… Mais par ailleurs, elle peut être compromise par le respect de règles d’accessibilité et de sécurité, pouvant être soumises à dérogations au Code de la Construction et de l’Habitation si le programme répond à « un objectif de mixité sociale », constituant un frein à la surélévation de logements intermédiaires ou libres.

Cela reste un levier intéressant pour la densification, encore assez peu investi mais ne doutons pas qu’avec les évolutions permises par la législation, les obligations concernant les nouveaux objectifs de performances énergétiques du parc de logements existants, le sujet sera plus fortement exploré par les collectivités et facilité dans les règles de leurs documents d’urbanisme, contribuant à compléter le panel des solutions pour « construire la ville sur la ville » afin de lutter contre l’artificialisation des sols.

Contact 

Antonia GARCIA-LANCESSEUR
Architecte DPLG - Urbaniste OPQU
Cheffe de projet Projet Urbain
a.garcia-lancesseuraudap.org

*28e rapport sur l’état du mal-logement en France 2023 – Fondation Abbé Pierre (décembre 2022)
** Actes des Entretiens d’Inxauseta 2022

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